Quand les pierres parlent
Page en cours de construction (photos à venir)

Les paroles s’envolent mais les écrits restent, surtout s’ils sont gravés dans la pierre. De tous temps, les hommes ont cherché à laisser une trace de leur passage. À Quibou, les pierres gravées sont essentiellement des plaques de construction des maisons, des linteaux de porte ou de fenêtre et beaucoup plus rarement des cheminées. À condition qu’elles n’aient pas été utilisées en réemploi dans les maçonneries, ces inscriptions apportent des informations précieuses sur les étapes de construction des bâtiments, le nom des bâtisseurs et leur statut social.


L’écriture et l’orthographe des inscriptions ont varié avec le temps.

Aux périodes les plus reculées, les abréviations sont nombreuses permettant ainsi de condenser le plus de texte possible sur un linteau de porte ou une fenêtre. Au XVIIe siècle, la lettre U est identique à la lettre V et le J semblable au I.


Le Grand- Chemin (1798), maison « PAR ALEX(andre) FONTAINE …je(anne) LEPLANQUAIS AN VI (1798) »

Les inscriptions sur les plaques suivent l’air du temps. Sur celle-ci, la date est mentionnée d’abord selon le calendrier républicain, puis selon le calendrier grégorien.


Le Hamel (1636)

Ancien linteau de fenêtre utilisé en réemploi en linteau de porte. On peut y lire : OLGRMEGVILM 1636 LEHOVSSVSAFEM . Que peut signifier ce texte sibyllin ? N’y voyez aucune formule secrète, ce mystérieux message nous livre simplement l’identité des constructeurs de manière très largement abrégée. C’est en effet : « Olivier GeRMain Et GUILleMette 1636 LEHOUSSU SA FEMme » qu’il faut ici comprendre. Olivier Germain était un laboureur aisé, son épouse Guillemette Lehoussu était issue d’une famille noble originaire du Bessin, implantée à Carantilly dès le XVIe siècle.


Le bourg, ancien commerce (1735)

« +IE ETE FAITE FAIRE PAR IEAN HVTTEMIN LAN 1735 (éclat dans la pierre) PAR RLP ». Jean Huttemin (1697-1772) était marchand mercier.


La Fauvelière (1756)

« FAI(t) FAIR(e) PAR GENEVI(e) VE LAINE VE(u)VE DE ANTOENE EVDE ET ANTOINE ET IOS( e)P(h) LEVR(s) FILS 1766 ECRI(t) PA(r) CHARLES FRANCOIS EVDE »

Voici une plaque fort « bavarde » qui non seulement nous renseigne sur la composition de la famille qui fit construire la maison mais aussi (ce qui est plus rare) sur l’identité de l’auteur du message… Les dates figurent toujours en chiffres romains, exception faite de celles suivant le calendrier républicain.


Métiers et enseignes

Dans les siècles passés, bon nombre d’artisans exercent leur profession dans les villages. Il est fréquent que ceux-ci fassent sculpter les symboles de leur métier sur leurs maisons en guise d’enseigne ou fassent mention de leur profession.


Le Foc (entre 1580 et 1610)

Linteau à accolade en pierre de Montmartin, utilisé en réemploi. Certains y voient une coquille Saint-Jacques, symbole bien connu de pèlerinage. D’autres pensent que l’élément représenté dans la pointe est une bourse. Dans les deux cas, nous avons affaire à des attributs du pèlerin.


Les Camps

Linteau, réemploi, double accolade ornée d’une hache de charpentier.


Le Pont Brûlé (1835), forge

« FAIT BÂTIR PAR JEAN C(har)les VAUTIER MARECHAL ET M(adam)e THERESSE DAMECOURT L’ANNEE 1835 »


La Péraudière (1697)

« FAITE FAIRE PAR THOMAS DOUCHIN NOTAIRE MARIE FLEURY SA FE(mme) 1697 ». Quibou a été un centre de tabellionage dès le Moyen-Age.


Le Bourg (1831)

« FAITE P(ar) J(ean) BAp(tis)te HEROUARD INSTITUTEUR ET MARIE FOSSARD SA F(em)ME EN 1831 » L’instituteur était un notable au 19e siècle et Jean-Baptiste Hérouard tient à laisser une trace de son statut sur la façade de sa maison lorsqu’il y entreprend d’importants travaux en 1831.


La protection divine, le clergé

Dans les sociétés de l’Ancien-Régime profondément marquées par la religion, la place du clergé est très importante. Le symbole de la croix, les monogrammes du Christ IHS pour Iesus Hominum Salvator et de la vierge MA pour Maria peuvent être gravés en signe de protection du logis et de ses occupants.


Le Grimbert (1667)

« CESTE MAISON A ETE FAICTE FAIRE PAR CHARLES LECONTE ET CATHERINE DV BOSC SA FEMME 1667 » Manteau de cheminée orné de fleurs de Lys, d’une croix et du monogramme du Christ.


Le Bois-Héron (1780), ferme

« Ce Mur à été fait rebatir par Mr L’ABBE DE BERNIERE CHAN(oine) DE DE COUTANCR par les Macons jacques eude et André pacary en l’an D(e) N(otre) S(eigneur) J(ésus) C(hrist) 1780 » La paroisse de Quibou n’avait pas de seigneur laïc mais dépendait du chapitre cathédral de Coutances. Elle était divisée en trois portions dont chaque seigneur était un chanoine. Jusqu’à la Révolution, le chapitre possédait des biens à Quibou dont la ferme de Bois-Héron. C’est pourquoi le chanoine de Bernière fait engager les travaux évoqués par cette inscription.


Le Hamel (1642), ferme

« GVILL(aum)E PORET ET OLLIVE BEAVFILS SA FE(mme) 1642 IHS ». Manteau de cheminée en chêne mis en œuvre en réemploi dans un logis du XVIIIe siècle.